L’Europe face au défi d’une indépendance technologique dans l’ère Trump

Face au retour de Donald Trump à la Maison Blanche, la question de l’autonomie numérique européenne devient plus pressante que jamais. De nombreux acteurs du secteur technologique en Europe soulignent l’urgence de réduire la dépendance aux géants américains dans un contexte géopolitique de plus en plus tendu.

Un scénario d’alerte qui fait réfléchir

Dans une réflexion prospective publiée sur LinkedIn le 25 janvier, Henri d’Agrain, directeur général du Club informatique des grandes entreprises françaises, propose un exercice de politique-fiction révélateur : « Le 4 juillet 2025 : le président Trump a signé un executive order avec effet immédiat, interdisant aux entreprises technologiques américaines de délivrer des produits et des services numériques au Danemark. »

Cette hypothèse d’un « embargo numérique » imposé par les États-Unis pour faciliter une prise de contrôle du Groenland peut sembler extrême. D’Agrain reconnaît lui-même que ce scénario provoquerait probablement une forte opposition des entreprises américaines concernées. Toutefois, ce récit met en lumière « le caractère systémique des dépendances numériques des États européens » vis-à-vis des géants technologiques comme Microsoft, Google, Amazon, Apple ou Meta.

Une prise de conscience accélérée dans le secteur privé

La politique commerciale offensive du président américain a considérablement ravivé les discussions sur l’indépendance technologique européenne. Geoffroy Petit, responsable données chez BearingPoint, un cabinet européen spécialisé dans la transition numérique, confirme cette tendance : « Tout cela revient sur la table. Nos clients se posent beaucoup de questions sur la souveraineté et sur les évolutions réglementaires. »

Cette préoccupation croissante dépasse désormais les secteurs traditionnellement sensibles. Yves Nicolas, directeur technique chez Sopra Steria, observe des « signaux faibles » qui témoignent de cette inquiétude dans les entreprises, « même en dehors des secteurs publics ou sensibles, comme la défense ou l’énergie ».

Un impératif stratégique pour l’avenir

Pour Julien Daval, vice-président de l’association de directeurs informatiques Club Décision DSI, la situation est claire : « L’élection de Donald Trump constitue un électrochoc. L’autonomie stratégique numérique de l’Europe n’est plus une option : elle est un impératif. »

Cette prise de conscience collective souligne la nécessité pour l’Europe de développer ses propres capacités technologiques et de réduire sa vulnérabilité face aux décisions politiques américaines. Les tensions transatlantiques accentuées par le retour de Donald Trump au pouvoir pourraient ainsi devenir un catalyseur pour accélérer la construction d’une véritable souveraineté numérique européenne.

Dans ce contexte, les débats sur les stratégies à adopter, les investissements à réaliser et les politiques publiques à mettre en œuvre pour garantir cette indépendance technologique occupent désormais une place centrale dans les réflexions des acteurs économiques et politiques européens.